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Robert Trujillo, St Anger et Metallica

Enfin les « Three Horsemen » ont trouvé un nouveau bassiste en la personne de Robert Trujillo. Il est intéressant de noter que le nom du prochain album, en l’occurence St Anger, ait été connu avant même que James, Lars et Kirk dévoilent le nom de leur maillon manquant. Ainsi la vraie question qui doit être posée est la suivante : Rob Trujillo est-il vraiment le maillon manquant ? Cette question est d’autant plus légitime quand on sait très bien que le quatrième membre de cette préstigieuse formation n’aura pas une grande marge de manoeuvre dans le prochain album car son recrutement s’est fait à peine de cent jours avant la date officielle du sortie du Lp.

En effet l’album St Anger est tant attendu non seulement par les fans mais aussi et surtout par la critique. Il faut bien dire que le groupe Metallica n’a pas d’albums depuis … six ans ! Evidemment on entend par là un album 100% Metallica. Car le Garage.inc ainsi que S&M sont des albums de reprises, bien sûr la créativité et l’energie de James & Co sur ces deux albums n’est pas remise en cause. Cependant avec St Anger les choses semblent être à maintes égards sensiblement différentes.

Tout d’abord cet album sort précisémment vingt ans après le mythique Kill’em all (1983). Tout le monde sait que cet album était pour l’époque, le moins que l’on puisse dire révolutionnaire, Seek & Destroy, The Four Horseman, Hit The Light, seront à jamais des titres mythiques en matière de Heavy Metal. Aujourd’hui ces titres consituent un défi pour nos horseman, car on peut se demander s’ils pourront encore jouer à quarante ans ce qu’ils faisaient à vingt ans ? En réalité, ce type de questionnement n’effleure pas l’esprit d’un James Hetfield ou d’un Lars Ulrich et certainement pas celui d’un Bob Rock. En effet dans divers interviews, surtout depuis la sortie du Load-Reload, les membres de Metallica n’arrêtaient pas d’insister sur leur besoin, presque vital, d’évoluer en matière de musique. Ils ne peuvent être prisonnier d’un certain stéréotype qui anéantissait toute créativité musicale. Ceci est confirmé à travers les divers albums sortis durant la carrière de ce groupe. En effet après un Kill’em All très speed et trash, vient un an plus tard un Ride The Lighting beaucoup plus heavy et sensiblement moins speed avec des titres comme For Whom The Bell Tolls, ou le mythique Call Of Ktulu sans oublier la jolie ballade Fade To Black. Le troisième album Master Of Puppets sorti en 1986, est dans lignée du précédent. Mais pour ceux qui ont l’oreille sensible plus que d’autres, remarqueront sans doute que sur cet album, Metallica sont sur la voie de la maturité musicale avec des titres comme Welcome Home (Sanitarium) ou Master Of Puppets. Avec l’…And Justice For All sorti en 1988, Metallica ne fait pas de concessions. C’est sans doute l’album le plus heavy jamais sorti par le groupe. On voit bien l’effet de la disparition du feu Cliff Burton, l’un des maîtres de la basse. En effet James, Lars, Kirk et le tout nouveau Jason vont essayer, et il le feront, de se surpasser. Une manière élégante de rendre hommage à Cliff tout en montrant au monde entier que l’entreprise Metallica continue son chemin…

Inutile de dire qu’avec le black album sorti en 1991 et sobrement intitulé Metallica, on assiste à un grand virage musical. C’est l’album qui a fait propulser le groupe sur la scène mondiale en devenant des îcones du Heavy Metal. Le black album est l’album de la maturité musicale de Metallica. Puis tout le monde connaît la suite, viendra le Load puis le Reload qui feront couler beaucoup d’encre de la part de la critique musicale. Cependant, on pourraît dire avec le recul nécessaire que ces albums sont eux aussi Heavy et non pas alternatifs comme aiment dire certains. Il suffit de voir les paroles assez épiques, de suivre la guitare de Kirk qui est en parfaite symbiose avec le ton vocal de James et les percussions de Lars pour comprendre que ces albums sont vraiment des perles. Ainsi en faisant ce petit rappel historique, on pourra dire que St Anger sera sans doute un album Heavy, mais Heavy selon la conception de James & Co, une conception qu’il ont developpé tout au long de leur carrière musicale.

Mais que fait Robert Trujillo dans tout ça ? Il est clair qu’en choississant ce bassiste les membres de Metallica sont conscients que la tâche qui incombe au nouveau membre n’est pas celle de contribuer au nouvel album, que l’on peut considèrer comme étant quasi-fait, mais de donner un nouveau souffle au groupe. N’oublions pas que l’affaire Napster, le départ de Jason, la cure de James, étaient des évenements assez destabilisateurs pour le groupe. Ils sont donc dans la nécessité de mettre les pendules à l’heure avec ce prodigieux joueur de basse. On peut même dresser le parallèle entre St Anger et le fameux …And Justice For All. Dans les deux cas Metallica entame un nouvel album avec un nouveau bassiste, mais surtout, et c’est ici qu’on peut vraiment comparer entre les deux albums, James & Co montrent qu’ils restent toujours les maîtres incontestables en matière de Heavy Metal malgré les problèmes divers qu’ils ont rencontré (la mort de Cliff en 1986, le départ, ou virement ?, de Jason en 2000). A ce stade on pourra poser une autre question assez capitale. Est-ce que le groupe Metallica cherche encore ses repères en matière de Heavy Metal ? Cette question qui pourra choquer beaucoup de fans, est sans doute légitime. Retournons un peu à l’histoire…

En 1996 sort le tant attendu Load. C’est l’album le plus contreversé de la carrière du groupe. La critique ne lâchera jamais les « four horsemen ». On les accuse de tous les maux (haute trahision à la musique Heavy Metal et aux fans, changement de look, le fait de devenir des pop star...). La sortie du Reload un an plus tard n’arrange pas les choses. Même si les membres du groupe résistent à la critique dans les divers interviews, le message des anti-metallica est pourtant passé. Que va faire le groupe ?

Pratiquement durant la période 1998-2000, James & Co vont calmer le jeu. Ils sont conscients que de toute façon ils doivent faire quelque chose, de montrer aux fans les plus exigents qui sont toujours là. Le Garage.inc est à ce propos un talentueux coup de poker. En faisant la reprise des groupes les plus prestigieux des années 70, Metallica cherche à conquérir le coeur des fans des premières heures. En effet, ceux qui préféraient Kill’em all, ou Master Of Puppets, aux nouveaux Lp retrouvent leur compte dans le huitième album de Metallica. Et on peut dire que le groupe a fait un bon coup, car sur le plan commercial Garage.inc a bien réussi. Avec le S&M le pari est d’un autre genre. En vérité il s’agit d’un double défi. Montrer d’une part que le groupe peut exceller en matière de live car il faut noter que la performance live (au niveau du chant et de la technicité) n’était pas toujours le point fort du groupe. D’autre part, le groupe voulait montrer qu’ils peut s’aventurer dans une entreprise aussi bien nouvelle qu’hasardeuse, celle de jouer avec une troupe symphonique. Histoire de dire aux fans : « Voyez-vous, on a fait le Garage.inc essentiellement pour vous faire plaisir, mais maintenant on veut aussi expérimenter d’autres choses… ». Mais celà ne veut pas dire que le groupe va orienter sa musique vers le rock symphonique, loin de là. En effet avec la sortie du single I Disappear en 2000 à l’occasion du sortie du film Mission Impossibe II, on voit bien que les four horsemen continuent à être influencés par les lignes directrices de la musique du Load-Reload…

Il paraît clair donc que l’album St Anger sera l’album le plus attendu de toute la carrière du groupe, car avec cet album, le groupe confirmera ses vrais repères musicaux. Même ceux qui ont juré de ne plus écouter le groupe après l’expérience Load, seront tout de même curieux de savoir que cache le nouvel album. Et pour ce qui concerne Robert Trujillo, il faut lui laisser un peu de temps pour savoir vraiment la vrai portée de son apport à la fois au groupe mais aussi et surtout à la musique de Metallica.

mars 2003, Ernesto Toreador